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Ma mère - saison 1 -

 

 

Poison de ma vie ! Poison de notre famille que tu as massacrée, dévastée, infestée de tes miasmes et de tes vices ! Derrière le masque de séduction que tu affiches afin de mieux pouvoir sucer le sang des autres pour finir par les dévorer, tu es noirceur, calcul, égoïsme, égocentrisme et vanité.

C’est quand j’eus l’âge d’aller ailleurs que j’ai réalisé que le fonctionnement de notre famille n’était pas normal. C’est quand j’ai été mère à mon tour que j’ai réalisé tous tes manquements, toutes tes fautes, tout ce que tu nous as fait et tout ce que tu ne nous as pas fait.

Je t’accuse, par tes attitudes et ton comportement d’avoir ravagé ma sœur ainée si fragile toujours en équilibre instable, tué dans l’œuf ce qui pouvait avoir de meilleur en elle et exacerbé tout ce qu’elle avait de pire. Je t’accuse d’avoir crevé au sens propre mon père qui est parti trop vite, trop jeune, pour ne pas avoir à vieillir à tes côtés, trop lâche pour prendre la décision de divorcer. Il l’a fait à sa façon : il a reproduit à l’identique pendant des années à l’intérieur de lui-même le cancer que tu étais dans son existence, tu l’as bouffé jour après jour. Ma sœur Dédoune te déteste, elle qui n’est qu’amour. Quant à moi je ne hais pas, la haine étant un sentiment qui m’est totalement étranger. Je te vomis.

« Je suis une bonne mère car j’aurais pu vous mettre à l’orphelinat ! » Rien qu’avec cette phrase, on peut déduire ce qu’est ta conception du devoir et de l’amour maternels. Et puis souviens-toi, c’était la fois où tu nous as joué ta pièce favorite en trois actes.

Acte premier. Pendant un mois, ta sœur et ton beau-frère étaient venus passer leurs vacances chez vous. Pendant un mois, mon père fut ton souffre-douleur, ton exutoire, ton crachoir, puisque tu avais  un public, autant en profiter pour montrer ta toute puissance. Il avait tout encaissé.

Acte deux. Après leur départ, il a bien fallu que tu descendes de ton Olympe pour régler le solde de ton compte avec lui : tu as préféré, dans ta grande lâcheté, esquiver le coup, battre en retraite en t’évanouissant, à proximité d’un bon fauteuil toutefois. Notre père nous a appelées à l’aide, ma

sœur et moi, tu sais ma petite sœur de nos misères, tu en fus une de taille, celles des origines d’où ont découlé toutes les autres, un vrai choléra, une peste noire qui continue de sévir alentour. Nous avons fait venir le médecin, qui se marrait bien de ton 13 de tension et de notre sottise. Comme nous

étions en pleine représentation théâtrale, ma sœur décida de te donner la réplique en entrant dans ton jeu : elle te réserva pour l’après-midi une place à l’hôpital.

Acte trois. Revenue dans l’après-midi pour t’y conduire je t’ai trouvée dans toute ta splendeur et toute ton agressivité fumant et balayant ta chambre, ta pièce favorite, hurlant au complot fomenté par les tiens et destiné à te mettre à la porte de chez toi. Et dans ton rictus mauvais, tu m'as craché : "Quand tu es née, j'aurais dû t'étrangler!".

Fin de la pièce. Bravo. Applaudissements. Rideau !

Je n’avais pas quinze ans quand du haut de ton comptoir tu m’as dit : « Je ne te demanderai jamais rien, mais ne me demande rien ! ». Et j’ai continué à ne rien te demander, à laver le peu de linge que j’avais ainsi que mon unique robe alors que tu gagnais des millions, puisque tu ne t’en préoccupais pas, à te voler dix francs de temps en temps dans ton porte-monnaie pour m’acheter un cahier et une brosse à dents puisque tu ne le faisais pas, à me tordre de douleur tous les mois sans consulter un médecin et sans prendre le moindre antalgique qui m’aurait soulagé, puisque ce n’était pas ton souci, à signer mon carnet de notes et à parler avec mes professeurs puisque ça ne t’intéressait pas, à trouver moi-même toutes sortes de solutions à toutes sortes de problèmes et à te les présenter puisque c’étaient mes problèmes et non les tiens. Je te remercie toutefois de ton indifférence et de tes successives défections, car ainsi ai-je appris très jeune à me débrouiller toute seule en toutes occasions, ce qui m’a été bien utile dans la vie. Finalement à ta façon tu fais partie de tous ces êtres qui m’ont permis de grandir.

« Je ne te demanderai jamais rien… », sauf que pendant vint-trois ans j’ai été ton seul bâton de vieillesse auquel tu t’accrochas sans vergogne, en constante demande, jamais contente, toujours insatisfaite, à l’image de ta vie.

Je t’accuse d’avoir été tout au long de ta trop longue existence au-dessous de tout. Tu pleures maintenant sur ta solitude mais sache qu’on ne reçoit d’amour qu’à la mesure de celui qu’on a donné. Combien de fois m’as-tu dit depuis trente ans au moins que tu voulais mourir ? Eh bien écoute : penses-y sérieusement.

Tout bébé oui je me souviens tu étais tendre et attentionnée : ça n’a duré que quelques années, tant que j’étais une poupée car tu aimes bien jouer à la poupée. Ce n’est pas contrariant une poupée, ça a peu de besoins, c’est petit et c’est joli. À six ans grâce à ton intervention j’ai pu sauter une classe. À

dix-huit ans tu m’as payé mon permis et une vieille 2cv toujours en panne. À vingt-huit ans tu m’as offert une machine à coudre et appris à faire une pince de couture. Voilà pour le positif. Examinons un peu le reste.

Toute petite je souffrais de brûlures à l’entrejambe, tu ne me lavais jamais, mes culottes de fillette étaient sales. Nous avions pourtant une vraie salle de bains, je n’avais même pas une brosse à dents. Quant au dentiste, c’est papa absent de la maison toute la semaine qui m’y conduisait quand elles faisaient trop mal et qu’on arrachait. Le docteur lui, je ne l’ai jamais vu à tel point qu’à huit ans alors que depuis deux ans je me plaignais d’un point de côté - mais m’entendais-tu, t’en souciais tu tellement centrée sur ton propre nombril comme tu le fus toujours ?-  Il a fallu m’opérer d’extrême urgence de l’appendicite et encore sur l’initiative encore de papa. À huit ans j’étais couverte de crasse, laissée à moi-même. Adolescente je me tordais tous les mois de mal au ventre mais tu n’as jamais jugé utile de consulter un médecin, ni à me donner un cachet ni même à me tenir la main.

Je ne me souviens pas t’avoir vue te lever avant neuf heures le matin pour me faire partir à l’école avec un petit déjeuner dans le ventre, pas plus que tu n’as jamais glissé un goûter dans mon cartable alors que je restais à l’étude du soir. Je salivais en regardant mes camarades manger à quatre heures et demie. Le jour de ma rentrée en sixième qui est un jour important pour tous les parents dignes de ce nom fut mon plus grand jour de honte. j'étais seule, tu as refusé de m'accompagner et je n’avais rien : pas de blouse, pas d’outils de travail parce que tu n’avais pas jugé utile de t’en préoccuper alors que nous habitions à cinquante mètres du collège.

Tout le monde me regardait de travers. La suite on la connait, je fus un cancre jusqu’en seconde, jusqu’à ce que je m’en aille de chez toi pour  où je n’avais pas ma place. Et toi que faisais-tu en ce temps-là ? Tu vaquais à tes occupations, c'est-à-dire écumer toutes les cartomanciennes de la région, aller chez ton coiffeur, faire la coquette et coucher avec tous les copains de papa, le facteur, le représentant, parader en ville avec ta copine Sylvie et papoter de vos amants respectifs.     

Je t’accuse de nous avoir mis des bâtons dans les roues, toujours. Je suis allée vivre chez une copine - merde je n'avais pas quinze ans - et tu ne t'es jamais préoccupée de savoir comment. Ses parents étaient très, très pauvres, c'étaient de mauvaises conditions sauf que je suis devenue une très bonne élève. Et toi qui chaque mois osait leur plaindre la maigre pension que tu leur donnais pour mon entretien alors que tu gagnais tous les jours des mille et des cents dans ton bar ! "Oh ils peuvent bien attendre une semaine de plus"! Salope !J’ai fait mes études malgré toi et j’en ai pris les moyens, en travaillant. Je me suis mariée parce que tu ne voulais pas de ça et que tu créais à la maison un climat intolérable. Je me suis mariée à vingt ans, contrainte et forcée par la pression que tu exerçais sur moi, avec un imbécile que tu avais mis dans mes pattes, pour te débarrasser de moi. Puis étudiante, sans le sou, tu ne m’as jamais donné cent francs pour payer mon essence ni acheté une robe ou une paire de chaussures, et j’allais mettre mes affaires au clou, alors que je faisais chaque semaine un long trajet en voiture pour venir rendre visite à mes parents en bonne fille respectueuse. Tout ce que j’ai eu je l’ai obtenu par ma seule volonté, mon seul travail et tu m’as aidée en aucune manière. Un jour très malheureux, ma sœur Dédoune avons eu un très, très gros problème qui je dois dire, a eu des conséquences graves sur le reste de ma vie : à peine avais-je ouvert la bouche pour t'en faire part, tu m'as répondu : "Je ne veux rien savoir, tais-toi!". Quand à quarante ans j’ai acheté ma maison, tu m’as refusé ta caution. Toute jeune, j’avais été le témoin muet mais pas idiot de toutes les humiliations que tu infligeais à mes sœurs ou à mon père que tu as successivement pris pour esclaves. Tu ne nous as éduquées qu’à travers le prisme déformant de ton esprit tordu et tu ne nous as jamais transmis les valeurs qui font des êtres structurés. D’autres se sont chargés de m’en faire cadeau qui m’ont montré la voie, indiqué des repères et j’ai eu bien de la chance de les rencontrer.

Je t’accuse de nous avoir toujours fait vivre dans le culte de ta personnalité, « Princesse Anastasia » (heureusement que le ridicule ne tue pas),

… et le culte de ton seul dieu : l’argent,

     ton seul critère de jugement : réussite sociale,

     tes seuls moteurs : frivolité, cupidité, orgueil et vanité,

… tes quatre piliers.

Tu n’es que grotesque, confite dans ta bouffissure, tu n’es crédible aux

yeux de personne, en tout cas pas auprès des gens de bon sens, de bonne éducation et de bon goût.

Nous nous sommes acharnées, mes sœurs et moi, à ne pas te ressembler et tu t’es toujours étonnée que je n’aie jamais rien à te dire. Je te laisse parler à tort et à travers en me fermant la cervelle et les oreilles sinon j’explose devant tant d’inepties débitées par ta bouche !

Je t’accuse de n’avoir jamais su conserver un ou une amie avec tous les gens que tu as connus. Il est vrai que tu n’as laissé un bon souvenir nulle part. Tu as su toujours beaucoup prendre des autres mais sans jamais rien donner. Tu ne sais pas cultiver l’amitié comme elle mérite de l’être mais tu sais utiliser parfaitement les gens tout autant qu’ils te sont utiles. Forcément un beau jour ils s’en aperçoivent et s’en vont. « Tout le monde m’aime », répètes-tu en leitmotiv. Quand on est aimé on n’a pas besoin d’en faire constamment état. Quand on est vraiment quelqu’un de bien on n’a pas besoin de s’en gargariser. Tout le monde t’aime mais tu n’as personne à tes côtés, cherche l’erreur !

Ce qui me fait penser à Sylvie, ta « meilleure amie » à Cavaillon dont tu as vendu l’amitié pour quatre mille francs de l’époque. Sylvie dont la gentillesse nous avait permis pendant des années de vivre au-dessus de nos moyens en nous louant pour un loyer symbolique une maison de maître. Vous

vous êtes fait dédommager pour libérer les lieux quand elle a vendu ! Tu lui as osé demander des dommages-intérêts, non mais quelle saloperie ! Je viens de l’avoir au téléphone, cinquante ans après, et lui ai demandé pardon en ton nom. Ce qui me fait penser à cette bonne Laurence, ta « meilleure amie » à Marseille qui t’a larguée quand tu t’es montrée grossière avec elle parce qu’elle avait envie de coucher avec un Noir. Mais toi-même n’as-tu pas couché avec un arabe, de vingt-cinq ans ton cadet de surcroît ? Qui te l’a jamais reproché ? En tout cas pas moi même si tu me faisais lever en pleine nuit à quatorze ans, de ton lit pour l’y mettre (je n’avais pas de chambre à moi : les clients d’abord, n’est ce pas ?). Ce qui me fait penser à Madame Harlin, ta « meilleure amie » à La Ciotat dont tu n’as su le décès que quelques années plus tard. Belles amitiés que voilà ! Et toutes les autres que tu as cassées, exploitées, humiliées… Tiens, la belle Suzon : une personne intéressante d’une grande classe, d’une grande élégance, qui t’a permis par son entregent de récupérer beaucoup d’argent et que tu n’as même pas eu la courtoisie de remercier. Mais tout en étant bête, tu es suffisamment intelligente pour reconnaître qui est mieux que toi et par jalousie tu l’as toujours détestée. Et la pauvre Nelly ta « meilleure amie » à Rougiers que tu as laissé tomber quand tu as quitté le village. Elle qui à son âge - le même que le tien au fait - te portait à vélo ce dont tu manquais ou te tenait compagnie. Pauvre Nelly à qui tu ne téléphones jamais mais elle à Rougiers et toi à St-Maximin, à quoi pourrait-elle te servir, pas vrai ?

Et ton premier petit-fils, l’enfant de ma sœur, veux-tu que je t’en parle ? Tu ne l’as pas gardé un seul jour alors que tu avais quarante ans, que tu étais à la maison et que tu ne foutais rien. Il était anorexique, s’arrachait les cheveux, pleurait sans cesse. Tu ne l’as pas aimé, tu n’as pas aimé Dédoune puisque au lieu de l’aider tu l’exploitais en lui prenant l’intégralité de son salaire. « J’étais trop jeune pour être grand-mère », bêles-tu. Mais il n’y a pas d’âge pour aimer ses enfants. On les aime en même temps que le reste, pas à la place quand on a perdu.

Et ton attitude avec ma sœur ainée fut au-dessous de tout, elle est malade de toi. À soixante quinze ans elle n’est toujours pas guérie. Tu as toujours pris un plaisir sadique à l’humilier, l’écraser, exacerber sa sensibilité d’écorchée en tenant des propos orduriers et malsains. Chaque fois que tu as ouvert la bouche, ce fut pour la démolir ou démolir quelqu’un qu’elle affectionnait. Tu critiques tout et tout le monde. C’est parfaitement inintelligent et parfaitement intolérable. Tu te prends pour une princesse mais tu es dans la boue. C’est parce que tu aimais tant ta fille ainée que lorsqu’à la mort de papa elle est revenue vivre chez toi dans l’état que l’on sait, pesant cinquante kilos et ne se nourrissant que de lait, tu la faisais dormir dans une chambre sans chauffage avec interdiction d’entrouvrir la porte de crainte que ça ne t’apporte un filet d’air frais ? Ou que tu ne pouvais plus lui assurer le café du matin ? Et que tu avais mis un cadenas au téléphone ? Salope !

Et tu t’étonnes toujours d’être seule ? Tu as passé ta vie entière à faire le vide autour de toi. Inondations, tremblements de terre en Italie n’ont jamais réussi à ce que passes un coup de fil à tes sœurs, à tes neveux, là-bas ! Quel monstre d’égoïsme es-tu ?

Tu ne peux, au détour d’une rencontre, par tes minauderies, que donner le change et lancer de la poudre aux yeux aux naïfs et naïves mais c’est là tous tes résultats. J’avais pensé en son temps que c’était une chance pour toi de venir dans notre village finir ta pauvre et misérable vie vide de sens comme elle l’a toujours été à voir grandir tes petits-enfants. Que pouvait-il t’arriver de mieux à ton âge ? Mais pouvoir contempler tous les jours les tiens heureux, unis, ne t’intéressait pas non plus. En tout cas bien des mamies non seulement s’en seraient contentées mais en auraient été très heureuses. Mais à part les futilités en tous genres : gueuletons, terrasses de café, inutiles parlottes, à quoi t’intéresses-tu ? « La gueule et le lit » disait papa en parlant de toi. Effectivement, du fauteuil au lit et du lit au fauteuil devant la télé. À ne lire que la vie des stars tu t’es identifiée à elles et tu as nourri une terrible frustration. Encore fallait-il avoir les moyens de ton ambition ! C’est la raison pour laquelle tu fus toujours malheureuse. Jouir des plaisirs sains de l’existence, avoir trois enfants en bonne santé, du bien en suffisance, une maison et même plusieurs ne pouvait pas te rendre heureuse car tu as toujours voulu péter plus haut que ton cul.

Comme je te connais bien, je connais tous les méandres tortueux de tes raisonnements à la noix et te voir vivre, penser, agir comme tu le fais me donne la nausée.

 Papa ne voulait pas qu’on se rebiffe, nous avons été toujours conditionnées. Mais le respect à tout âge se mérite. Dommage qu’il se soit comporté comme une serpillère avec toi, nous n’aurions pas eu à gérer « ça » et tu as littéralement empoisonné nos quatre vies. Mais qu’as-tu fait ? Gagner et amasser de l’argent ?

 

Mais à quoi sert-il quand on a perdu l’amour de tous ?

Et aujourd’hui, tu n'as même plus d'argent et nous allons devoir gérer cela aussi, en plus de tout le mal que tu nous as laissé en héritage.



26/10/2015
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